tribunelibre

PAR FRÉDÉRIC TADDEÏ

La porcelaine de Limoges et… la respiration circulaire mongole !

Il y a de bonnes raisons pour expliquer pourquoi la Porcelaine de Limoges n’a pas été retenue par l’Unesco, qui devait, en novembre dernier, annoncer les nouveaux inscrits au patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Il semblerait qu’une question de procédure soit à l’origine de cette “non sélection”. Sans entrer dans les détails, ce serait une demande de dernière minute de la part de l’Unesco, réclamant un rapport sur les “dimensions anthropologiques, psychologiques et sociologiques” de la Porcelaine de Limoges, qui aurait décidé l’État à retirer le dossier. Il se pourrait également, selon des sources officieuses, que l’absence d’un ambassadeur de France à l’Unesco, depuis que Rama Yade n’occupe plus ce poste depuis l’été dernier, ait pesé dans la décision.
Moi, je me pose juste quelques questions : sur quels critères et quels dossiers le tissage traditionnel dans les Émirats arabes unis, la respiration circulaire mongole ou la narration dramatique iranienne, qui ont eu la chance d’être retenus, ont été jugés ? Leurs “Rama Yade à eux” étaient-ils présents à Bali lors de cette réunion, leurs villes respectives ont-elles fait plus de lobbying que la ville de Limoges qui soutenait sa porcelaine ? A-t-on demandé à Limoges de passer son tour pour ne pas nuire à d’autres candidatures plus “sensibles” ? Certainement un peu de tout ça et peut-être bien d’autres choses encore.
En fait, cet échec n’est peut-être pas vraiment important. La porcelaine de Limoges et, par extension, toute l’activité céramique qui lui est indissociablement liée, n’a pas besoin de l’Unesco pour faire connaître son savoir-faire. Je dirai même que l’aspect ”patrimoine de l’Unesco” sent un peu la naphtaline (je sais, j’exagère un peu !) pour une activité où l’artistique et le scientifique se rejoignent, comme c’est rarement le cas dans le monde industriel. Il serait peut-être plus judicieux pour les porcelainiers limougeauds de continuer à jouer la carte de l’innovation scientifique, de l’avant-garde en terme de design et d’outils marketing d’aujourd’hui plutôt que de concourir aux côtés des chants de prières de la forêt tropicale du sud Pérou !
Pour la troisième fois d’affilée, la porcelaine de Limoges devrait toutefois représenter sa candidature dès cette année 2012. Espérons que nous ne serons pas coiffés sur le poteau par les traditions pâtissières du Timor inférieur ou les techniques de respiration des plongeurs d’Acapulco ! Et, en plus, Rama Yade ne sera toujours pas là pour défendre nos tasses et assiettes…